lundi 7 mars 2011

La langue de chez nous...


C'est une langue belle avec des mots superbes 
Qui porte son histoire à travers ses accents…

Alors pourquoi les Français s’entêtaient-ils à la tourner dans tous les sens, à raccourcir les expressions le plus possible et à parsemer leurs phrases d’un nombre incalculable de mots anglais?

« C’est complètement relou ce truc, j’te promets! Mon manager veut que je refasse tout le mailing sinon, il dit qu’on va perdre les sponsors. J’en ai marre et en plus j’ai bien trop de taf. Je suis tellement vénère!», maugréa une femme début trentaine à la table voisine du café où je me trouvais. 

Et moi qui avais toujours cru que les Français maîtrisaient mieux la langue de Molière que nous! À force de capter toutes ces bribes de conversation dans les lieux publics, j’avais été forcée de constater que cette croyance populaire était fausse.  

Il m’avait toute de même pris un certain temps avant de bien saisir les mots qu’ils utilisaient.

Le plus difficile à déchiffrer avait été le verlan. Au départ, lorsque j’avais entendu toutes ces expressions bizarres, j’avais cru bon de courir tout droit à la librairie la plus proche pour me procurer le dictionnaire le plus récent, puisque de toute évidence, il y avait trop longtemps que je n’avais pas ouvert ma vieille édition 1989 poussiéreuse. Puis, ne voyant aucun de ces mots inscrits, je crus qu’il s’agissait d’un mode d’expression spécifiquement pour les jeunes. Comme nos « cool, genre et full » du temps. Mais, je me rendis compte que ces termes s’étaient répandus à toutes les strates de la population. J’en étais finalement venue à la conclusion que toutes les complexités de la langue française avaient fini par rendre les Français si 
« vénères » (traduction—énervés), qu’ils s’étaient rebellés et avaient décidé de rendre la langue encore plus confuse en tournant tous les mots à l’envers. Ainsi, ils disaient maintenant ouf pour fou, chelou pour louche, chamé pour méchant et zarbi pour bizarre. 

Puis, il y avait les anglicismes ou emprunts à l’anglais. Je savais que nous étions reconnus pour être les champions dans le domaine avec nos autos qu’on parke dans le stationnement, notre beurre de peanuts qu’on étale sur nos toasts et nos napkins qu’on utilise pour s’essuyer, mais les Français semblaient pouvoir rivaliser avec nous sur ce point. À l’inverse de nous, eux, stationnaient leur voiture dans le parking, mangeaient des pancakes, posaient leurs assiettes sur des sets de table et passaient chercher leurs vêtements au pressing. Jusque-là, j’avais compris que nous avions chacun nos petits travers et que le choix des mots était tout simplement différent jusqu’à ce que je surprenne la jeune femme demander à sa comparse, tout en tapant sur son iPhone : 

« Comment dit-on planning en anglais? »

Je terminai mon café et décidai de partir. Je fouillai dans ma poche pour trouver de la monnaie en pensant que s’ils ne faisaient pas plus attention, ils allaient bientôt perdre leur langue.

Je checkai alors pour voir que le bill était correct, payai, puis m’en alla en pensant que j’étais badluckée de toujours m’assoir à côté de gens pas bright bright et que oh combien je trouvais ça l’fun qu’au Québec, on préservait mieux la langue française!

©Marilyn Préfontaine