lundi 24 janvier 2011

Sunday, bloody sunday!


J’avais les deux yeux encore à moitié fermés lorsque j’ouvris le réfrigérateur ce matin-là.

« Bon! Il n’y a plus de lait… », soupirai-je. « Je vais à l’épicerie, tu as besoin de quelque chose? »

« Euh Chérie… on est dimanche! »

Eh merde! Ça, ça voulait dire que je devais soit me rendre à l’autre bout de la ville pour aller au petit dépanneur qui était exceptionnellement ouvert le dimanche, soit manger mes céréales avec du jus d’orange…


« Viens te recoucher mon amour! », m’enquit mon amoureux.

Me recoucher? Quelle idée! Il était déjà onze heures. Je pensai à tout ce que j’aurais déjà accompli si j’avais été dans ma maison à Québec : deux lavages, des lunchs pour la semaine, trois allers-retours entre la pharmacie, le Wal-Mart et l’épicerie. 

Mais ici en France, le dimanche est sacré! Magasins, boutiques, épiceries, boulangeries, presque tout est fermé. C’est jour de repos pour tout le monde!

Une fois par semaine, la ville entière reprend ainsi son souffle, épuisée par le mouvement continuel, le bruit des klaxons incessants et les sirènes de police qu’elle a supportés pendant six longs jours. Le pavé prend un congé bien mérité après avoir soutenu le poids d’une quantité incalculable de talons Gucci, bottes de travail et roues de différents véhicules motorisés. Le dimanche, il se permet même de nous renvoyer l’écho de nos pas, alors qu’on arpente presque seuls les rues de la capitale.

Alors que les Français profitent tout simplement de cette journée pour rester chez eux, pénards, nous, Québécois, nous fendons en quatre pour organiser des activités mur à mur de notre fin de semaine afin d’être certains de rentabiliser chacune de nos précieuses secondes de congé.

La première fois, j’avoue avoir quelque peu angoissé : ne rien faire? Pas de magasins dans lesquels me « garrocher », pas d’épicerie à faire, pas de souper de famille ou d’amis prévus et l’appartement qui venait d’être astiqué… Comment allions-nous nous occuper?

J’avais alors compris que pour la première fois depuis bien longtemps, je pouvais, sans en ressentir une once de culpabilité, dormir jusqu’à midi comme une adolescente, me balader tranquillement à un rythme presque trop lent, faire du lèche-vitrine complètement économique, m’arrêter pour admirer le paysage, manger sans être pressée et… être avec mon amoureux, tout simplement. Est-ce que les Français auraient trouvé une partie de la clé du bonheur?

La porte du frigo toujours grande ouverte, mon regard oscillait entre le carton de jus d’orange et ma paire de souliers sur le bord de la porte. Finalement, j’étirai le bras et pris le restant de baguette de la veille que je coupai en deux et tartinai d’une généreuse couche de délicieux Nutella.

« Qu’est-ce qu’on fait aujourd’hui? », me demanda mon amoureux en me voyant arriver avec le petit-déjeuner près de lui.  

Je tirai les rideaux et poussai un grand soupir de soulagement.

« Absolument rien! », lui répondis-je en me glissant sous les couvertures.

©Marilyn Préfontaine