lundi 11 octobre 2010

Wifi-toi!


« Faudra attendre au minium trois semaines, Madame…Madame? Vous êtes là? »


Ça y était, j’allais m’évanouir… Comment allais-je pouvoir tenir trois semaines sans connexion Internet?

Pas de panique! Pas de PANIQUE! Je devais rester zen…

En se ré établissant ailleurs, je savais bien que j’aurais quelques concessions à faire, mais… TROIS SEMAINES!

Je devais me ressaisir; Internet ne devait pas être si difficile que ça à trouver dans une ville comme Paris. Allons! Pourquoi m’affoler?

Je me rendis alors dans un « café Internet » qui consistait plutôt en une série de trois ordinateurs dans un coin, séparés par des demi-paravents. Dans ce petit local, qui était à peu près grand comme une chambre d’enfant, on y avait aussi entassé quatre isoloirs avec des téléphones pour faire des interurbains. Je pouvais donc distinctement entendre simultanément une conversation en allemand, une en ce qui me semblait être de l’espagnol et l’autre en italien.

Pour la concentration, on allait devoir repasser!

Je m’installai donc et ouvris ma boîte de courriels.

Quarante-deux nouveaux messages!

Les quinze premiers provenaient évidemment de ma mère qui s’inquiétait. Outre les spams, les deux publicités pour grossir une anatomie dont je ne disposais pas et un courriel qui m’annonçait que j’étais l’heureuse héritière de la fortune d’une grand-tante qui vivait étrangement en Côte d’Ivoire, j’avais un message de ma meilleure amie et un de ma grande sœur.

Je commençai à répondre :
Sqkut lqlqm  (Traduction : Salut maman)

Que se passait-il? Cela faisait pourtant bien longtemps que je connaissais mon doigté. Je regardai alors plus attentivement mon clavier et m’aperçus que les lettres n’étaient pas dans le bon ordre. Était-ce une plaisanterie? Ou peut-être que j’avais malencontreusement pris un clavier arabe?
Je me penchai discrètement la tête au-dessus de l’isoloir voisin et m’aperçus avec terreur que le clavier était pareil. Je venais tout simplement de faire connaissance avec le clavier AZERTY…

Une demi-heure plus tard, j’avais réussi à écrire trois lignes de peine et de misère en tapant une lettre à la fois comme une attardée. Totalement exténuée, je décidai donc de mettre mes amis en C. C.


Il devait y avoir une autre solution…

Le lendemain, je pris mon ordinateur portable et me résignai à me rendre chez Starbucks. Quel cauchemar! Lorsque je réussis finalement à commander mon énorme café qui coûtait, ma foi, trois fois le prix d’un bon café Tim Hortons, je me dirigeai vers les fauteuils qui étaient bien évidemment tous pris. Au bout de dix minutes et après m’être fait voler mon siège deux fois, je réussis enfin à me glisser entre deux Parisiens sur un sofa violet.

Je scrutai les environs à la recherche d’une source d’électricité pour brancher mon portable avant de constater que bien sûr, il n’y en avait pas et évidemment, je n’avais pas pensé à recharger la batterie... 

Je devais en avoir tout au plus pour quinze minutes. Génial!

L’ordinateur s’ouvrit et inévitablement, j’avais oublié de baisser le son au préalable.

J’esquissai un petit sourire poli tandis que tous les autres clients se retournèrent vers moi en entendant la joyeuse mélodie d’accueil de Windows.

Mon portable sur les genoux, j’essayai d’établir la connexion pour me rendre compte, au bout de dix minutes, qu’il n’y en avait tout simplement pas!

Je repartis donc bredouille avec mon café imbuvable, parce que comble de malheur, il n’y avait même plus de lait!

De retour à l’appartement, je lançai à mon amoureux, à bout de nerfs :

« Soit on pirate le réseau de quelqu’un, soit je prends un billet aller simple pour Québec! »

« On va trouver une solution », m’assura-t-il avec son calme légendaire.
Quelques grandes respirations plus tard, je reviens voir mon copain qui était installé à cuisine, crayons de couleur et ciseaux étalés devant lui.

« T’as décidé de faire du bricolage? »

« Non, j’ai eu une bonne idée. », m’annonça-t-il fièrement tout en me tendant une affiche faite à la main où on pouvait y lire en grosses lettres rouges :

Échangerais connexion Internet contre du sirop d’érable canadien!

Le lendemain, la voisine de dessus frappait à notre porte. J’avais ma connexion Internet! Alléluia!

©Marilyn Préfontaine